Une évaluation pour saborder l’école
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A la rentrée 2007, le ministre de l’éducation, Xavier Darcos, avait annoncé un renforcement de l’évaluation des élèves en primaire et une évolution des contenus des évaluations nationales pour les élèves de CE1 et de CM2. Le 11 décembre 2007, il précisait publiquement que les résultats de ces évaluations « seront rendus publics école par école dès la rentrée 2009 ».
Les 2 et 3 octobre, les modalités de « l’évaluation des acquis des élèves en français et en mathématiques en CE1 et CM2 » ont été présentées aux inspecteurs d’académie et aux inspecteurs de l’éducation nationale. Le Ministère a renoncé à la publication des résultats, ce qui aurait entériné une mise en concurrence sauvage des écoles les unes avec les autres, condamnée et refusée par le milieu enseignant. Néanmoins, les performances « de la France entière, des académies et des départements » seront accessibles en ligne. La hiérarchie s’emparera des résultats pour « repérer les marges de progrès, fixer des objectifs locaux et mobiliser les équipes ».
Les orientations du ministère sont claires et explicites : alors que les anciens protocoles privilégiaient le diagnostic et constituaient ainsi des outils professionnels pour la classe, les prochains tests seront exclusivement ciblés sur la mesure des acquis scolaires des élèves par rapport au programme. Autrement dit, ils ne viseront qu’à mesurer la performance du système éducatif, celle de l’élève tout autant que celles de l’enseignant et de l’équipe pédagogique.
Progressivement mais assurément, on prépare l’opinion publique à l’idée que la mission première de l’enseignement réside en la quête permanente de la performance et du classement. Les élèves seront en effet répartis selon leur niveau en deux moitiés égales, pour définir une médiane permettant des comparaisons départementales, académiques et nationales. On introduit subtilement à l’école, une culture du résultat et du mérite, dont on connaît pourtant bien les dégâts et les écueils dans l’univers impitoyable de la grande entreprise. Cela n’aura pour effets que d’accentuer les pressions sur les enfants en difficulté scolaire et à disqualifier ceux issus des milieux populaires. Qui plus est, le ministre de l’éducation nationale a récemment annoncé le versement d’une prime « exceptionnelle » de 400 euros aux enseignant-es des écoles faisant passer ces évaluations. L’individualisation des salaires et la fragmentation des carrières sont des réponses à l’opposé de ce que nous attendons pour revaloriser le métier. C’est aussi une façon inique et méprisante de s’asseoir sur le travail en équipe qui prévalait dans de nombreuses écoles pour la passation, la correction et l’analyse des livrets d’évaluation. C’est en résumé un déni du travail en équipe et une mesure contraire aux bonnes pratiques.
Cette nouvelle réforme n’a rien à voir avec l’Éducation. Elle participe, en la stigmatisant, de la casse généralisée de l’École publique et laïque. Elle est à l’opposé de nos aspirations, de nos convictions éducatives et de nos missions professionnelles, tant d’un point de vue éthique que sur le plan didactique et pédagogique.
C’est pourquoi, SUD Éducation Guyane appelle les collègues à ne pas faire remonter les résultats.
SUD Éducation réclame :
Des outils qui permettent de remédier aux difficultés de certains élèves.
La non publication des résultats des écoles pour qu’elles restent un véritable outil d’évaluation.
Des évaluations qui permettent de mesurer les acquis de la partie du programme que les élèves ont effectivement suivie.
Du temps pour, en collaboration avec les membres du RASED, corriger, interpréter ces évaluations, rencontrer les parents (donc plus de remplaçants).
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